Corps et âme

Corps et âme,
Mon amour navigue,
Sûr de te trouver toujours,
Se renforce de notre sillage,
Se retrouve toujours,
Au mouillage, à tes côtés.
Mon amour pour toi, de corps et d’âme.
Je t’aime d’impossible,
D’horizon, de masse négative, d’infini,
Je t’aime de ce qui n’existe pas,
Mon âme.
Il me faut bien ça, Laura.
Rien que ça, mais tant que ça.
Parce que tu es là,
Heureuse dans l’eau,
Assise juste là, avec tes regards bleus,
Ou marchant à mes côtés, gonflée de tendresse.
Parce que je ne peux y croire.
Mon amour pour toi est mouvement, sons,
Embruns et soupirs de soupapes échaudées,
Il est ventru comme un vieux cormoran heureux,
Mon amour est,
Mon amour sera, par delà notre fin, par delà tout,
Comme ce qu’il y a quand rien n’existe,
Comme ce qu’il y a par delà l’horizon.
Nos mots flottent,
Choses glissant sur la cambrure de nos vagues,
Qui ne cesseront plus de flâner.
Nous nous sommes inscrits,
Nous nous sommes enchevêtrés, perturbés, entrelacés.
À tes bras je me suis amarré,
Et je laisse aux passerelles d’eau douce,
Les cadenas des amours incertaines.
Corps et âme je ne suis pas perdu.
Nos caresses ont projeté leurs ombres sur la houle,
Nous avons courbé les lumières,
Nous avons changé l’avenir,
Traversé l’océan, connu le monde, lavé nos assiettes,
Élevé des chats, dansé et construit des meubles.
Nous avons accouché du passé, et créé une logique.
Nous avons aboli les masses et soumis la mort.
Nous nous sommes inscrits.
Souvent je pense que nous sommes ceux que nous attendions.
Mon amour est mouvement.
Il est une goutte d’eau, orpheline d’un embrun perdu.
La gravité est ma boussole, le vent ma volonté.
Depuis le début de mon vol, je me sens atterrir, je me sens glisser.
Je touche une feuille, je touche une peau, dont tu es l’arbre.
Et chaque jour, au gré de soudaines rafales, je touche de nouvelles feuilles,
Je découvre tes nouveaux choix, nouvelles mélancolies, nouvelles joies.
Ta peau que le soleil doit envier,
Ton rire que les animaux tristes réclament,
Ton souffle funambule que les gens pressés ne comprennent pas.
Je vole, et je te regarde.
Je te regarde et je vois.
À tes côtés, il n’y a plus de sol cruel qui attend ma chute.
Tes feuilles, celles que visitent parfois des oiseaux d’argile,
Tes feuilles m’abritent.
Tu es l’arbre que j’ai trouvé en mer.
Mon amour, mon amour n’est pas idée, n’est pas principe,
Mon amour est mouvement, son, toucher, mon amour est salé.
Il est le peu d’iode que je laisse sur tes branches,
Le son que je fais en t’effleurant.
Mon amour est la couleur que tes feuilles lui donnent,
Délicieuse certitude d’être devenu rosée marine.
Nul besoin de croire.
Nul besoin de fin.
Je t’aime corps et âme.



Leo S. Ross
14 12 2014